Notre cher Chanoine Sesboüé avait été très heureux que notre Ensemble paroissial publie, semaine après semaine, ses homélies dominicales. Après son décès, après quelques semaines de recueillement, par fidélité et reconnaissance, nous reprenons la diffusion de ces belles méditations.
18ème Dimanche du Temps Ordinaire, année A
Il est beaucoup question de nourritures dans les textes bibliques entendus en ce dimanche : mangez de bonnes choses nous a dit le prophète ; tu leur donnes la nourriture en temps voulu, chante le Psaume ; tous mangèrent à leur faim, écrit l’évangéliste.
La nourriture est une condition de notre vie terrestre ; elle fait partie du plan créateur de Dieu. Jésus a participé aux repas des hommes ; ce miracle des païens nous apparaît d’abord comme un repas festif auquel prend part une foule qui a faim. Ce fait a frappé les foules ; il est remarquable qu’il nous soit rapporté six fois dans les évangiles, puisque Marc et Matthieu nous en offrent deux récits, placés dans des contextes différents. Cet évènement répond d’abord à la pitié humaine de Jésus envers les personnes physiquement affamées. Mais son sens va plus loin : la nourriture physique devient une image d’autres formes de nourriture, spirituelles celles-là. Sans vouloir épuiser la richesse des enseignements qui ressortent de ce miracle, nous soulignerons deux points importants.
- ) Le pain de la parole
Dès l’Ancien testament, la nourriture matérielle évoquait une autre nourriture, celle de la parole de Dieu. L’écouter, l’approfondir dans la foi est pour le fidèle une véritable nourriture spirituelle. Nous connaissons la sentence du Deutéronome, reprise dans le récit de la tentation de Jésus en disant : l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui sort de la bouche du Seigneur. La première lecture de ce dimanche exploite ce thème en joignant ces deux appels : mangez – écoutez. Ecoutez et vous vivrez, c’est-à-dire écoutez pour vivre. Dans l’évangile de ce jour, ce thème n’est évoqué qu’indirectement : si les foules suivent Jésus jusqu’au désert, c’est pour l’écouter. En donnant le pain, il montre qu’en prêchant le royaume il est le pain vivant qui nourrit par sa parole.
2) Le pain du corps vivant
Le lecteur constate que le récit du miracle proprement dit lui disent en deux versets est volontairement calqué sur celui de la cène, avec les quatre verbes-clefs : prendre – dire la bénédiction – rompre – donner. Cet enchaînement se retrouve tout au long du Nouveau Testament pour évoquer tel ou tel repas : s’il ne s’agit pas toujours de l’eucharistie, ce sont des faits qui doivent y renvoyer le lecteur. Ici Les évangiles nous appellent à voir dans les pains donnés à la foule l’image, l’annonce du mystère eucharistique. A la cène que Jésus demande de répéter tout au long de l’histoire, c’est le corps livré à la mort et vivant par la résurrection que nous contemplons, dont nous faisons notre nourriture.
Ces deux symbolismes du Pain sont mis en lumière dans le grand discours sur le pain de vie de l’évangile selon Saint jean ! Jésus est le pain de la parole qui demande notre foi ; Jésus est le pain rompu dont la mort nous sauve et la résurrection nous apporte la vraie vie, qui se donne en nourriture pour nous unir de plus en plus à lui. C’est alors que le mot communion atteint son plus haut degré !
Et depuis les origines, le mystère eucharistique n’est jamais célébré sans comporter la lecture solennelle de la parole de Dieu, dont le point culminant est le texte de l’Evangile. L’Eglise a compris que les deux tables de la parole et du corps vivant du Christ sont indissociables. Le dernier concile nous dit : la liturgie de la parole et la liturgie eucharistique sont si étroitement unies entre elles qu’elles constituent un seul acte de culte.
De ces réflexions nous pouvons tirer d’abord un appel concret à notre exactitude pour notre messe dominicale. Un retard non-motivé par une urgence est en fait une mésestime de la parole proclamée au début de la célébration. Mais il nous faut aller plus loin et entrer dans ce désir profond de communion avec notre sauveur. Aimer sa parole, son eucharistie c’est l’aimer lui-même en profondeur.
En ce temps de vacances ou beaucoup d’entre nous peuvent se reposer du travail quotidien, il nous faut essayer de faire une place plus grande à la rencontre du Seigneur. Nous nous posons alors deux questions : comment vais-je me nourrir de la parole de Dieu ? De l’Evangile, bien sûr, mais dans un sens plus large, de textes d’auteurs spirituels, d’articles nourrissants pour la foi. Il nous faut lire autre chose que les magasins ou des romans…
Par ailleurs, notre désir de l’eucharistie peut se traduire par une participation à la messe au cours de la semaine. Jésus nous attend toujours à ce rendez-vous d’amour. Sachons aussi entrer dans une église ou une chapelle pour prier devant le tabernacle du Saint Sacrement. Cela aussi manifeste notre désir de l’Eucharistie. Dans son commentaire sur ce texte évangélique, Saint Ephrem le Syrien écrit : Ce n’est pas à sa puissance qu’il a mesuré ce miracle, mais à la faim de ceux qui étaient là… Les réalisations de Dieu dépassent tout désir. Pour remercier Jésus de s’offrir à nous, accueillons avec amour les richesses du pain de vie. Amen.