Pendant de nombreuses années, les paroissiens ont bénéficié des homélies et enseignements du Chanoine Sesboüé, exégète, ancien professeur au Séminaire et intervenant à la Formation permanente du diocèse. Après son retrait des activités paroissiales il a pris le temps de collecter et relire toutes ses homélies des trois années liturgiques. A partir du temps de l’Avent de cette Année A, chaque dimanche, nous nous réjouissons de méditer avec lui la Parole de Dieu.
Épiphanie 3 janvier 2010
Qu’est-ce que l’Epiphanie ?
Le mot signifie « manifestation ».
Tout événement qui laisse percevoir, à travers l’histoire humaine de Jésus, sa grandeur divine peut être appelé « manifestation ». Pensons notamment à ces nombreux miracles.
Mais pour célébrer ce mystère de Jésus qui se révèle, l’Eglise a privilégié deux scènes inaugurales : le baptême du Seigneur, que nous fêterons dimanche prochain, et, comme nous le voyons aujourd’hui, la visite des mages à l’enfant Dieu. Cette rencontre très simple entre ces sages d’Orient et l’enfant de la crèche est épiphanie en ce sens que l’Eglise perçoit d’avance la reconnaissance de la grandeur de Jésus non seulement par des juifs mais aussi par des païens venus de loin – sans cet enfant particulier de la royauté. C’est le thème spirituel le plus important de ce récit auquel nous pouvons nous arrêter aujourd’hui.
Trois types de rois nous sont en effet présentés dans ce beau texte de saint Matthieu. Hérode, appelé le roi Hérode, non sans une nuance d’ironie de la part de l’évangéliste ; Les mages, qui certes ne sont pas appelés rois, mais que Matthieu présente comme tels en reprenant des expressions d’Isaïe et des psaumes : « Tous les rois se prosterneront devant lui … et ils lui offriront des présents ; enfin le roi par excellence Jésus, appelé roi des Juifs, mais que la tradition chrétienne reconnaît comme le roi du monde.
En fait, et c’est le point qui rend cette scène très actuelle, Matthieu annonce déjà la réaction des hommes devant la personne de Jésus : les disciples et les adversaires.
– Le roi Hérode fut pris d’inquiétude et tout Jérusalem avec lui. Ce sera le cas des habitants de la ville sainte peu favorable à Jésus au jour de l’entrée triomphale (Matth 21, 10) : toute la ville fut en émoi.
Hérode est troublé par la naissance d’un enfant que l’on appelle roi et qui pourrait lui faire concurrence. Mais il se trompe : cruel Hérode, dit la liturgie, pourquoi crains-tu ? Il n’enlève pas les liens mortels celui qui apporte les liens célestes.
Cette réaction d’Hérode qui en veut à la vie de l’enfant, annonce les futurs opposants à Jésus, à commencer par les autorités juives inquiets du sort de leur loi et de leur temple.
Puis ce seront les romains dont le rôle est important dans le récit de la passion.
Finalement tout ceux qui, au cours de l’histoire, considèreront que l’événement de la vie de Jésus gêne leur tranquillité ou leur égoïsme.
Peu de temps avant cette venue l’auteur du livre de la sagesse expliquait ce drame de l’incrédulité en faisant parles les impies : Tendons un piège au juste puisqu’il nous gêne…Sa vue seule nous est pesante parce que sa vie n’est pas semblable aux autres…
– les mages, au contraire, qui offrent de bon cœur des trésors précieux sont le signe, l’annonce de tout ceux qui, dans l’humilité, accueillent Jésus comme l’envoyé de Dieu venu les sauver. Car la royauté de Jésus n’est pas pesant : il nous demande d’accepter son joug qui est doux et son fardeau léger pour que nous puissions êtes libérés de toute forme d’égoïsme et vivre, à travers les sacrifices nécessaires, dans le vrai bonheur des enfants de Dieu.
Jésus se définit ainsi comme le serviteur de ses frères et nous invite à nous unir à cette royauté de service.
Les rois des païens leur font sentir leur domination… qu’il n’en soit pas ainsi pour vous… que celui qui commande se conduise comme celui qui sert… je suis au milieu de vous comme celui qui sert.
L’épiphanie nous apparaît ainsi comme la première célébration de la royauté de Jésus (il y aura le dimanche des Rameaux et la fête du Christ Roi) qui appelle les hommes à le suivre.
Ce thème de l’option en face de Jésus qui parcourt tout l’Evangile, est profondément actuel.
Que voyons – nous en effet dans notre monde ?
Sans parler de ceux qui sont incroyants parce qu’ils n’ont jamais entendu l’Evangile et qui vivent dans leur bonne foi, nous avons toujours, vis à vis de Jésus, ces deux groupes d’adversaires et de disciples ?
Les adversaires peuvent témoigner d’une opposition militante ou d’une indifférence apparemment tranquille. Mais l’indifférence est une forme de refus comme l’exprime cette sentence évangélique : qui n’est pas avec moi est contre moi. Particulièrement dramatique est la situation de ceux qui ont abandonné Jésus et que nous désirons retrouver dans la communion de l’Eglise.
Le groupe des disciples est le nôtre, celui auquel nous voulons appartenir en profondeur par notre communion avec Jésus et avec nos frères. Pour nous, c’est l’appel au progrès spirituel que nous voulons entendre pour redire comme saint Pierre : A qui irions – nous, Seigneur ? Tu as les paroles de la vie éternelle.
A Jésus qui nous comble de grâces et nous appelle sans cesse à une vie de foi et d’amour, nous voulons redire, du fond du cœur : Me voici Seigneur.
Ecoutons s. Ephrem :
Notre roi vient dans sa grande gloire ; allumons nos lampes, sortons à sa rencontre. Réjouissez-vous-en lui comme il s’est réjoui en nous et nous réjouit par sa glorieuse lumière.
Amen